Le 13 mai dernier, le Tribunal administratif du Québec (ci-après : TAQ) tranche en faveur d’un accidenté de la route et modifie la décision de la SAAQ à l’effet de refuser une adaptation spéciale demandée par cet accidenté.

Il s’agit d’une victime d’un accident de la route. Suite à cet accident, la victime est quadraplégique. Au moment de l’accident, il était éleveur de bovins et opérateur de machinerie lourde. Aussi loin qu’il se souvienne, l’accidenté a toujours été sur une ferme. Cette dernière appartenait d’ailleurs à ses parents avant qu’il ne prenne le relais.

L’élevage, les machineries lourdes ainsi que sa terre n’étaient pas un travail pour lui, mais bien une passion. Il tirait beaucoup de fierté de l’exploitation de sa terre alors qu’il a dû faire le deuil de toutes ces activités.

Vous imaginez que suite à cet accident et considérant sa condition, il n’a pu reprendre son emploi. Il est donc déclaré invalide par la SAAQ. Il ne pouvait, par contre, pas croire qu’il n’allait plus jamais remonter sur un tracteur et pouvoir se promener sur ses terres. La situation l’a beaucoup affectée psychologiquement.

La Loi sur l’assurance automobile mentionne que la SAAQ :

« […] peut prendre les mesures nécessaires pour contribuer à la réadaptation d’une victime, pour atténuer ou faire disparaître toute incapacité résultant d’un préjudice corporel et pour faciliter son retour à la vie normale ou sa réinsertion dans la société ou sur le marché du travail.»

Cependant, il ne s’agit pas d’une obligation pour la SAAQ. En effet, considérant le mot «peut» au début de l’article de la loi, cela signifie que la SAAQ n’a pas d’obligation de prendre les mesures, elle a ce qu’on appelle un pouvoir discrétionnaire.

Mais attention, les tribunaux ont mentionnés à plusieurs reprises que la SAAQ ne peut refuser une demande de façon abusive, sans justification et de façon déraisonnable, tel que le présent cas.

En effet, considérant que cette victime avait un besoin psychologique d’avoir son tracteur et qu’il s’agissait de la seule façon pour lui de retrouver une petite partie de sa vie avant son accident, sa demande n’était donc pas un caprice.

Le TAQ a rendu plusieurs décisions en faveur d’accidentés de la route afin d’accepter de faire l’adaptation d’un vélo ou autres articles sportifs, mais c’est la première fois que le Tribunal accepte une telle adaptation.

Le tracteur de cet accidenté était le vélo d’un sportif qui est habituellement adapté par la SAAQ!

Le TAQ a appliqué la loi comme elle devrait l’être, soit de façon large et libérale et qui devrait être en faveur des victimes d’accidents de la route.

Le TAQ dans son jugement mentionne ceci :

«[31]Le Tribunal est d’opinion que la partie intimée (la SAAQ), se doit de prendre toutes les mesures nécessaires pour replacer un accidenté, dans la mesure du possible, en tenant compte des handicaps résultant de l’accident, dans le même état qu’il était auparavant, et ce, pour atténuer ou faire disparaître toute incapacité résultat d’un dommage corporel.

[32]La partie intimée doit prendre toutes les mesures nécessaires pour pallier physiquement ou psychologiquement au déficit anatomophysiologique.»

Je crois qu’il serait bien de retranscrire le dernier paragraphe de cette décision afin de terminer sur une note inspirante :

« [34] Au lieu de se lamenter sur son sort et d’être confiné à son fauteuil roulant, le requérant a fait preuve d’une détermination, d’un courage, d’une volonté à surmonter tous ses handicaps physiques qui méritent d’être soulignés. C’est par ce genre de comportement qu’on évitera aux accidentés de la route de sombrer dans un état de détresse totale. Ainsi, ils reprendront goût à la vie.»

Quoi dire de plus!

N.b. : Nous avons joint le texte intégral du jugement sur notre site internet. Bonne lecture!

Me Lucrezia Plutino
LP Avocate

1 Loi sur l’assurance automobile, LRQ, C. A-25, art. 83.7
2 2013 QCTAQ 0557, paragraphe 31-32, 13-05-2013
3 2013 QCTAQ 0557, paragraphe 34, 13-05-2013